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CÔTE D'IVOIRE:VIOLENCES ELECTORALES ;UN JEU DEMOCRATIQUE BIAISE

Jeu démocratique biaisé. Violences électorales en Côte d'Ivoire

Une situation qui rappelle étrangement la présidentielle de 2010, avec les mêmes signes...
 
Le Nouveau Courrier
 

Municipales Côte d'Ivoire Avril 2013

A peine la fin du vote que déjà des contestations du scrutin dans plusieurs localités sont enregistrées. Certains candidats sont accusés d'avoir usé de fraude, d'intimidations et autres actes de violences pour perturber la proclamation locales des résultats ou influencer les résultats. Une situation qui rappelle étrangement la présidentielle de 2010, avec les mêmes signes.

Bassam : Des recours contre le candidat RHDP

Grand Bassam n'a pas échappé aux velléités de fraudes, d'irrégularités et autres anomalies. A en croire les manifestations qui ont eu lieu hier lundi 22 avril 2013 devant les locaux de la Cei locale. Pour ces manifestants, partisans du candidat indépendant, Ollo Germain, les irrégularités constatées sont de nature à compromettre la sincérité du scrutin et des résultats. Il s'agit entre autres des procès verbaux mal renseignés. De plus, 3/4 des urnes provenant des 103 bureaux de vote qui sont arrivées non scellées malgré la présence de procès verbaux les déclarants scellés.

Toujours selon les griefs enregistrés, des signatures des représentants des candidats variaient d'un procès verbal à un autre. Aussi, étaient-ils remplis avec des écritures différents et des stylos de couleurs différentes. Toutes ces irrégularités ont été notifiées sur le procès verbal de recensement général des votes et validées par les différents membres de la CEI locales. Conséquence, les candidats indépendants Ollo Germain et Tall Yacouba ont décidé de saisir la Chambre administrative de la Cour suprême, contre le candidat RHDP, Ezalé Philippe.

Treichville : Pdci et Rdr se proclament chacun vainqueur

Alors que les tendances donnaient le candidat du Pdci en tête des dépouillements, la Cei locale de Treichville a été saccagée aux environs de 21h 30 mn par une horde de jeunes, faisant ainsi planer une hypothèque sur la proclamation des résultats de cette commune. Et depuis, dans la matinée d'hier lundi 22 avril 2013, les deux états-majors célébraient chacun à sa manière «sa» victoire.

Mais pour trouver une solution immédiate et efficace à la situation de saccage des locaux de la CEI locale, la CEI a invité, hier lundi 22 avril 2013, les deux états majors du candidat du PDCI, François Albert Amichia, et du candidat Rdr, Cissé Ibrahim, à apporter leurs différents Procès verbaux (PV) des 125 bureaux de vote et des 18 centres d'élection, pour une confrontation avec les PV que la CEI a pu sauvegarder après le passage des vandales.

Le camp de François Amichia s'est aussitôt rendu à la CEI locale sis à l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre (ONAC-VG), accompagné d'un huissier de justice, pour faire authentifier ses PV. « Il faut que le RDR ait le courage de déposer ses PV pour une confrontation. Nous avons gagné. Tout ça est fait pour qu'on reprenne les élections. Ce n'est pas bien. Dieu merci la CEI a pu sauvegarder des PV. C'est dommage qu'il y ait tant de violence pour une élection municipale», a fait savoir Assane Soumahoro, membre du staff du candidat Pdci.

Ferké : le siège de la CEI locale attaqué

Des individus ont attaqué, hier lundi 22 avril 2013, le siège de la commission électorale indépendante locale, empêchant ainsi la proclamation des résultats des élections locales qui se sont déroulées, dimanche, dans la région, a constaté l'AIP. Le siège de la CEI, sis au quartier résidentiel, a fait l'objet d'attaque d'individus, hier lundi, à 14H.

Armés de bidons d'essence et de projectiles, ces jeunes gens, surexcités, ont réussi à faire irruption dans le siège qu'ils ont tenté d'incendier sans succès, empêchés par les forces de l'ordre. Prévue pour être annoncée dimanche soir, la proclamation a été empêchée par ces mêmes individus qui avaient saccagé des urnes dans des bureaux de vote. Remise à hier lundi, en début d'aprèsmidi, elle n'a pu non plus se faire, à cause des mêmes individus, apparemment en "mission commandée", ont indiqué des témoins.

Prikro : des urnes brûlées, des agents CEI molestés

Depuis dimanche soir, les résultats de la municipalité de Prikro n'ont pu être proclamés, suite à des manifestations qui ont conduit, hier lundi dans la mi-journée, à la destruction de quelques urnes et à l'agression de délégués de la Commission électorale indépendante (CEI) locale. Selon la CEI, la proclamation des résultats des élections régionales s'est déroulée dans le calme, cependant celle des municipales n'a pu avoir lieu, parce que des urnes qui avaient été sécurisées ont été incendiées hier lundi, a appris l'AIP auprès de la Cei régionale.

Des urnes volées à Toumodi

Des urnes ont été volées, dimanche soir, pendant leur acheminement à la sous-préfecture au siège de la commission indépendante locale, a-t-on appris sur place. Selon les informations, il ressort que six urnes de l'Ecole primaire d'Abli, une sous-préfecture du département de Toumodi, qui ont été victimes de ces actes de vandalisme. Après la fin des décomptes aux environs de 20H, dans les derniers bureaux de vote, les commissaires de la CEI sont convoyés vers la sous-préfecture quand le véhicule transportant les commissaires est intercepté et vidé de ses urnes dans les rues de Toumodi, explique-t-on. Informé de la situation, les forces de sécurité se sont déployées pour davantage sécuriser les autres urnes.

Koumassi : les partisans de Bacongo tentent d'incendier la mairie

Des partisans du candidat RDR aux municipales de Koumassi, Cissé Ibrahim Bacongo, ont tenté hier lundi 22 avril 2013, d'incendier les locaux de la Mairie de la commune. C'est l'impressionnant dispositif sécuritaire déployé aux alentours de la Mairie qui a finalement dissuadé les partisans du candidat Rdr. Pendant ce temps d'autres manifestants avaient érigé des barrages dans certains quartiers, en incendiant des pneus sur les voies. Notamment sur les lignes 32 et 13.La plupart des commerces avaient fermé pour éviter la visite de pilleurs et autres vandales.

Course-poursuite dans les rues de Yamoussoukro

Des participants du candidat indépendant, François Konian, venu en seconde position pour les municipales locales, ont décidé de se faire entendre bruyamment devant la CEI locale de Yamoussoukro, hier lundi 22 avril 2013, où se proclamaient les résultats officiels, avant de prendre la grande artère érigeant des barricades et incendiant des pneumatiques usés sur la voie publique où ils prenaient de déposer des tas d'immondices.

Ces manifestants ont opposé une résistance à la police qui a dû user de gaz lacrymogènes, les pourchassant dans les rues, avant de les disperser aux environs de 13H. Selon le porte-parole des partisans de M. Konian, il y aurait eu « beaucoup de fraudes » au détriment de leur « champion».

Violences électorales. Pourquoi 2015 fait déjà peur !

Un parti au pouvoir dont les loubards impunis persévèrent dans la violence. Une Commission électorale discréditée et partisane. Une communauté internationale complice. Ce cocktail explosif pourrait bien exploser au visage des Ivoiriens lors des prochaines élections générales. Et plonger à nouveau le pays dans les plus grands troubles.

"Un scrutin transparent pour un avenir sombre", écrivait, avec une troublante lucidité, notre regretté devancier Jérôme Diégou Bailly, éditorialiste du Jour des grands jours. Il évoquait les élections municipales de 2001, qui avaient vu la participation des trois grands partis politiques et avaient témoigné - selon son analyse - d'un inquiétant tropisme ethnique décelé dans les choix électoraux, annonciateur d'une fracture nationale à venir.

On pourrait aujourd'hui le paraphraser en écrivant "un scrutin chaotique pour un avenir qui fait peur". En effet, les élections locales qui viennent de s'achever mettent en lumière un certain nombre de phénomènes pour le moins préoccupants.

Premièrement, la culture de la violence et de la fraude, qui fait partie de l'ADN du RDR selon ses détracteurs, est une fois de plus venue perturber ce qui devrait être une "fête démocratique". Urnes cassées, procès-verbaux falsifiés, sièges locaux de la Commission électorale attaqués... Le modus operandi est désormais classique. 

Et on ne peut que se poser une question : si pour des "petites élections locales", on déplore des affrontements postélectoraux dans un grand nombre de circonscriptions,qu'en sera-t-il lors de la présidentielle de 2015 ? La Côte d'Ivoire ne replongera- t-elle pas dans la guerre ? Et si ce n'était pas fini ? L'inconscient collectif rumine ces questions anxiogènes.

Deuxièmement, la Commission électorale dite indépendante est plus que jamais discréditée. Des récriminations considérées hier par certains comme les "jérémiades de Gbagbo le mauvais perdant"apparaissent désormais comme des vérités d'évidence. Prise en otage par les partis politiques du RHDP, notamment par le RDR, l'institution chargée d'organiser le scrutin et d'annoncer les résultats provisoires ne joue pas franc jeu. Et les suspicions qui l'entourent alimentent la défiance nationale et présagent de lendemains inquiétants, si l'institution n'est pas réformée en profondeur, et arrachée des mains de personnes qui sont à la fois juge et partie.

Troisièmement, la lâcheté de la "communauté internationale", qui n'a pas réussi à imposer des réformes électorales minimales au pouvoir lui explose une nouvelle fois au visage. En dépit de l'exclusion de fait d'un FPI marginalisé au sein d'une CEI partisane, de la fraude et des violences, l'ONUCI a "sanctifié" les dernières législatives, qui ont accru les déséquilibres nationaux et renforcé artificiellement la position dominante du chouchou des Occidentaux qui règne sur Abidjan.

Et demain ? Il faut craindre qu'en l'absence de pressions significatives relevant de "l'ordre interne", la prochaine présidentielle ivoirienne ressemble à s'y méprendre au dernier scrutin similaire en République démocratique du Congo. Où la fameuse communauté internationale a assisté, à la fois réprobatrice et complice, au sacre ambigu d'un Joseph Kabila qui avait été porté à bout de bras par le"système" en 2006. A tel point que son adversaire Jean-Pierre Bemba, victorieux à Kinshasa, avait été "transféré" à la Cour pénale internationale de La Haye. Comme pour faire "place nette".

Philippe Brou

LE NOUVEAU COURRIER



24/04/2013
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