AMMAFRICA WORLD

Le sujet est délicat, voire sensible. Car il s’agit des centaines, des milliers de personnes brutalement privées de louer, d’adorer Dieu à leur manière. Mais comment  en est-on arrivé là ? La question  est d’importance.

Avant d’esquisser la moindre réponse, il faut aussi chercher à savoir où peuvent conduire ces actes administratifs qui, de mon modeste point de vue, arrivent à la fumée des cierges. En médecine, on dit« prévenir vaut mieux que guérir ». En politique on dit « gouverner, c’est prévoir ».

Le schisme en religion n’est pas un phénomène récent. Il date d’Abraham, le père des…mouvements religieux révélés que sont le Judaïsme, le Christianisme et l’Islam. Dans chacune de ces communautés se sont développées des milliers de séparations. Chacune avec ses dogmes. Et tant qu’il y aura des hommes qui se veulent croyants, il y aura d’autres  scissiparités engendrées par les interprétations des textes sacrés se fondant sur la sensibilité pour ne pas dire la sensiblerie des uns et des autres, pour ne pas  parler de leurs intérêts…matériels. Toujours est-il, comme le dit Paul de Tarse, qu’au jour du Jugement Dieu reconnaîtra les siens.

Pour le moment, c’est chacun qui, dans sa chapelle se croit plus proche de Dieu au point de maudire, de condamner et de tuer s’il le peut, son mécréant de voisin, de parent, de fils, de fille, de mari ou d’épouse. Combien de drames enregistrons – nous tous les jours que Dieu nous accorde, au nom de ce même Dieu pourtant réputé riche en amour, compatissant et, toujours prêt à…pardonner ?

Il faut dire que depuis la promulgation des lois sur les libertés de décembre 1990, les Camerounais sont  ivres-fous de démocratie, de liberté d’expression, de liberté du culte, de liberté d’entreprendre, de liberté d’investir  même les lieux publics. La constitution de 1996 précise cependant que « nul  ne peut être inquiété en raison de  ses origines, de ses opinions ou croyances religieuses…sous réserve du respect de l’ordre public et des bonnes mœurs ». Le tout est de savoir si chacun de nous, là où il se trouve et dans ce qu’il fait, observe scrupuleusement cette prescription constitutionnelle. Cela ne semble pas être le cas. La plupart des églises nouvelles sont  plus actives à des heures indues où les gens ont besoin de repos et de refaire leurs forces pour leurs activités le lendemain.

Il semble que « c’est pour chasser les démons et délivrer  les âmes prisonnières du monde des ténèbres »  renseignent des ouailles de ces sanctuaires. D’autres rétorquent que là-bas on est plus solidaire. Les plus nantis soutiennent  les moins fortunés ; on est « frères et sœurs », « papas et mamans ». On se retrouve là dans une autre famille avec des « relations plus humaines entre fidèles. Lors des nuits de prières ou des séances de délivrance, on vit des miracles, avec guérisons instantanées, des démons qui aboient et hurlent sous l’effet du feu du Saint Esprit… » soutiennent ceux qui sont nés de nouveau dans le Seigneur. Les disciples de Thomas se font leur religion avec ces affirmations. Les adeptes des églises de réveil, eux, tournent le dos à  leurs parents biologiques et anciens amis.

Là-bas, le culte est mielleux. On ne promet pas le ciel après les souffrances de ce monde comme le font les églises traditionnelles de nos arrières grands parents. Le bonheur doit commencer sur terre quand l’homme est délivré des liens des coutumes, des traditions, de la sorcellerie, bref de tout ce qui le maintient en captivité comme naguère le peuple hébreux en Egypte pharaonique. Il n’est pas moins vrai que dans ces congrégations, les néophytes sont soumis à un vrai lavage de cerveau. Opération menée par des spécialistes formés par des psychologues et des psychanalistes qui subjuguent   leurs ouailles par des promesses mirobolantes du bonheur qui  les attend dès qu’ils ont tout donné au Seigneur.

Il faut avoir un niveau très élevé de discernement pour ne pas succomber aux chants des sirènes par ces temps où le chômage, la misère, la délinquance et les frustrations de toutes sortes tenaillent les fils et filles d’Adam et Eve. Ces pionniers de notre monde dont les péchés d’orgueil et de désobéissance ont transformé le paradis qui était le leur en un champ de ronces et d’épines. Aussi les églises dites de réveil sont arrivées en masse pour rétablir cette ère de béatitude. Au pays de « on va faire comment ? » on y accourt pour chercher délivrance et restauration. Sous le regard complaisant d’une administration très peu regardante sur tout ce qui détourne l’homme des préoccupations réelles de son existence.

Toujours est-il que le bonheur des uns fait le malheur des autres. Si ces églises apportent sur terre à leurs adeptes les délices du Ciel, de l’argent aux propriétaires qui leur donnent leurs maisons en location et de l’oxygène financier à leurs pasteurs dont la plupart sont des illuminés « inspirés par l’Esprit de Pentecôte », elles défient l’Etat dont elles passent outre les lois, agressent outrageusement les voisins qui n’ont plus de nuits paisibles à cause des nuisances sonores. Des effets qui ne sont pas souvent  différents de ceux des bars dancings. Bacchus, disciple de Belzebuth et  les descendants d’Abraham finissent par fumer allègrement le calumet de la paix dans  nos quartiers.

Quelle promiscuité !

Qu’à cela ne tienne, il est temps que tout bon citoyen intègre les lois des Etats laïcs et modernes où la liberté de certains ne doit pas enfreindre celle des autres. Le Père du Christianisme a prêché par l’exemple à travers ses multiples actes d’obéissance, de respect de la loi et de l’amour du prochain. Rendez à Dieu ce qui est à Lui et à César ce qui lui revient, a-t-il enseigné. Contrairement aux appréhensions des donneurs de leçons d’outre-atlantique et d’ici, il ne s’agit pas d’une persécution massive des fidèles des églises dites de réveil, mais d’un nécessaire rappel à l’ordre pour tous les citoyens épris de paix et de convivialité. Il est évident que chez nos amis de l’Occident, les aboiements du chien de quelqu’un ne sont pas tolérés par des voisins qui font intervenir dare dare  les services municipaux compétents. A plus forte raison des incantations intempestives à des heures indues de la nuit où tout un chacun a besoin de repos et de calme.

Il y a tout simplement lieu d’espérer que les chapelles qui sont en contravention avec la loi voudront bien se mettre en règle au lieu de camper dans l’illégalité, que leurs adeptes ne vont pas se regrouper en confréries intégristes de droit divin pour défier l’Etat et le reste de la société civile. Les Saintes écritures nous apprennent aussi que l’autorité vient de Dieu.

Doo Bell in Le Messager

CAMEROONVOICE