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MASSACRE EN SYRIE;MASSACRE AU CONGO:DEUX POIDS;DEUX MESURES!

Massacre en Syrie, massacres au Congo : deux poids, deux mesures

La communauté internationale s’est naturellement émue du massacre de Houla, en Syrie, qui a couté la vie à 108 personnes dont des enfants. L’ancien Secrétaire général de l’ONU, Koffi Annan s’est rendu dans le pays pour exprimer « son horreur » et a rencontré le Président Bachar el-Assad. Au même moment, des massacres de plus grande ampleur se déroulaient dans l’Est de la République Démocratique du Congo. Des civils achevés pour la plupart à l’arme blanche dans le silence assourdissant des capitales occidentales. La crise du Congo, qui dure depuis 16 ans, avec un terrible bilan de six millions de morts, est sûrement l’illustration la plus tragique de la politique internationale du « deux poids deux mesures ».


L’Est du Congo est, en effet, actuellement en proie aux violences depuis la tentative ratée de capturer le criminel de guerre Bosco Ntaganda. Cet officier tutsi, né au Rwanda mais revendiquant la nationalité congolaise, croule sous plusieurs chefs d’accusation. Des crimes de guerre et crimes contre l’humanité qui lui vaut d’être sous le coup d’un mandat d’arrêt émis par la Cour Pénale Internationale.

 

Soucieux de redorer son image assombrie par lesmagouilles électorales de novembre 2011, le Président Joseph Kabila a entrepris de le capturer alors qu’il jouissait depuis toujours d’une totale impunité. Il avait même été promu général et placé à la tête des unités de l’armée nationale engagées dans les opérations au Kivu. Mais les temps changent et lorsqu’on a les mains à ce point couvertes de sang, personne n’est en mesure de vous garantir l’impunité. Ce qui devait arriver est donc arrivé. Sauf que l’opération de capture a été tellement mal préparée que l’individu a eu le temps de fuir. Depuis, il parcourt les maquis pour réactiver les miliciens tutsis avec le soutien du Rwanda, provoquant la réaction d’autres groupes armés dont les tristement célèbres FDLR impliqués dans les récents massacres.

 

Ces rebelles hutus rwandais avaient longtemps bénéficié d’un regard bienveillant de la part des populations congolaises martyrisées par les agressions militaires menées au Congo par le régime rwandais de Paul Kagamé. Mais la mentalité « barbare », dont ils n’ont jamais réussi à se départir, et qu’ils ont « exportée »au Congo, a fini par lasser la population qui ne supporte plus leur présence sur le sol congolais.

 

Une force internationale est pourtant déployée au Congo sous l’égide de l’ONU. Des casques bleus malheureusement incapables de se faire respecter par les belligérants. Les groupes armés qui errent dans la région se livrent aux exactions contre des civils parfois en leur présence. En novembre 2008, lorsque la milice CNDP, dirigée par les généraux Laurent Nkunda et, justement, Bosco Ntaganda, lance une attaque sur la route de Goma, elle détruit deux blindés estampillés « Nations Unis », blesse plusieurs casques bleus et massacre 140 civils dans la localité de Kiwanja à quelques dizaines de mètres d’un campement des casques bleus indiens. En juillet 2010, des miliciens hutus investissent la localité de Luvungi et violent pendant quatre jours de suite toutes les 303 femmes et filles que comptait le village.

Cette mission de l’ONU coûte chaque année plus d’un milliard de dollars aux contribuables des pays riches, qui, en ce temps de crise, devraient logiquement s’interroger sur son utilité. C’est la mission onusienne la plus coûteuse et probablement l’une des plus inefficaces. Comparée à d’autres missions internationales, en termes de coût et d’efficacité, on admet que la MONUSCO mérite largement les critiques qui lui sont régulièrement adressées.

 

En Libye, le contribuable français a payé « seulement » 300 millions d’euros pour mettre fin au régime de Mouammar Kadhafi. L’opération a duré à peine huit mois. En République Démocratique du Congo, la mission onusienne dure depuis onze ans en engloutissant des sommes faramineuses pour entretenir une force qui assiste quasiment les bras croisés au massacre. Une passivité, hélas, destinée à durer aussi longtemps que la communauté internationale ne se sera pas penchée sur les principaux facteurs de la crise du Congo que sont le Rwanda et l’exploitation anarchique des richesses minières.

 

Sur le Rwanda, en effet, depuis l’arrivée de Paul Kagamé au pouvoir en 1994 (d’abord comme vice-Président, puis comme Président), c’est un régime dur et intransigeant qui sévit dans ce pays, condamnant une partie de sa population à l’exil. Il n’y a pas véritablement d’opposition et la presse se trouve dans un tél état de soumission au pouvoir qu’un débat libre sur un possible règlement pacifique de la rébellion hutue est inenvisageable. On estime qu’en concédant quelques assouplissements, le régime de Kigali pourrait contribuer de manière décisive au règlement de la crise du Congo. Seulement voilà ! Les grandes puissances, coupables d’inaction pendant le génocide de 1994, n’osent rien exiger au dirigeant rwandais.

L’autre démarche pouvant contribuer à régler durablement la crise du Congo serait la mise sous contrôle internationale de ses gisements miniers, en particulier ceux des zones de conflit. Ce pays regorge d’immenses richesses minières (cassitérite, coltan, diamants, or, cuivre, cobalt, zinc, manganèse,…) dont les réserves sont estimées à plus de 24 mille milliards de dollars. Ces richesses, qui auraient dû procurer un bonheur incomparable aux Congolais, sont paradoxalement, la source de tous leurs malheurs. Leur exploitation anarchique ou sous des contrats opaques s’opère au prix d’exactions contre les habitants à qui ne restent que des miettes.

 

Des groupes armés, soutenus par les pays de la région, s’emparent de secteurs miniers qu’ils exploitent en infligeant des souffrances inouïes aux habitants (massacres, assassinats, viol, travaux forcés, enrôlement d’enfants,…). Penser seulement que les auteurs de récents massacres sévissent sur une région considérée comme étant la plus grande réserve mondiale de coltan (80 % des réserves mondiales). Un métal extrêmement précieux dans la fabrication des téléphones portables et autres appareils électroniques. Penser aussi à l’immense réserve de pétrole récemment découverte dans la même région et dont l’exploitation annoncée fait craindre de nouveaux conflits.

 

En plaçant ces gisements sous le contrôle d’un organisme international, au besoin par la force, on priverait ces groupes armés des moyens qu’ils se procurent grâce au trafic des minerais du sang.

Mais rien de tout cela n’est entrepris, et le massacre continue.

En tout cas, sans une mobilisation internationale de grande ampleur, comme cela est le cas autour de la crise syrienne, l’issue à la tragédie du Congo n’est pas pour demain.  

 

  Boniface MUSAVULI 

 Agoravox.fr



31/07/2012
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