Jeune Afrique : Jean Van Lierde, militant pacifiste belge, auteur de "La pensée politique de Lumumba", qualifiait Lumumba de "météore à l’ascension fulgurante". Que reste-t-il aujourd’hui de ce "météore" selon vous ?
Elikia M'Bokolo : La particularité de ce personnage, ou du moins ce qu’il en reste, c’est précisément ce caractère de "météore". Aujourd’hui, il me semble qu’à la suite de toutes une série de facteurs, en RDC, les gens ne se rendent pas compte de ce qui s’est passé autour de ce personnage. Il y a pourtant en Lumumba tout un héritage que les Congolais pourraient s'approprier dans les nouveaux combats qu’ils peuvent mener, aussi bien au niveau international par rapport à leurs frontières immédiates, mais également au niveau même de l’organisation interne de la société. Lumumba est la preuve que le combat finit par payer, et que les ressources ne sont pas forcément là où on pense qu’elles se trouvent.
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Pensez-vous que la Belgique soit prête, aujourd'hui, à baptiser une place ou une avenue Lumumba ?
Je pense que nous devons aider nos "amis belges" à sortir de l’histoire et à entrer dans le présent. Les Belges sont bien placés pour le comprendre car ils ont eux-mêmes été soumis à une domination étrangère. Le combat qu'ont mené ensemble Flamands, Wallons, germanophones, libéraux et laïques, franc maçons et croyants ; nous, Congolais, l’avons expérimenté de notre propre gré dans un mouvement absolument extraordinaire dont le Mouvement national congolais a été la forme la plus achevée. Ce serait tout à l’honneur de la Belgique de reconnaître que le peu de choses qu’elle a faites au Congo, a eu pour effet de faire émerger des personnalités qui se sont élevées et avec lesquelles beaucoup de Belges étaient en accord. On oublie souvent de rappeler que la Belgique n’est pas une unité compacte dans laquelle tout le monde aurait été d’accord pour dominer les Congolais !
Une plaque provisoire déposée par des riverains à Ixelles. © D.R.