CONGO BELGE:Un mercenaire Belge s'empare de Bukavu et se proclame Président
Le 5 juillet 1967, le mercenaire belge Jean Schramme, s'empare de la ville de Bukavu et se proclame président de la République démocratique du Congo
Le 5 juillet 1967, le mercenaire belge Jean Schramme, secondé par son compère français Bob Denard, s'empare de la ville de Bukavu. Et se proclame, pour paraphraser Mobutu, «pince-sans-rire, président de la République démocratique du Congo» Il va résister jusqu'au 5 novembre de la même année avant de se retirer au Rwanda.
Le Colonel Schramme et la guerre de Bukavu 1967
Jean Schramme (25 mars 1929, Bruges, Belgique-14 décembre 1988, Rondonopolis, Brésil) était un chef de mercenaires belge. Naissance à Bruges, en 1929, sous le signe des Poissons. Fils cadet d'une famille honorablement connue dans la ville. Profession du père: avocat. Hobby: le scoutisme. Signe distinctif: parfait bilingue. Début d'une biographie linéaire et sans histoire? Voire. A dix-huit ans à peine, le virus de l'aventure, qui l'a saisi au fil de ses longues heures de lecture solitaire de récits de voyages, le pousse, avec l'appui de ses parents, à tenter la «grande expérience coloniale». Et, sitôt le pied mis sur le continent africain, ce sera le coup de foudre: «Voici ma patrie», dira-t-il à ses amis lorsqu'il gagne la province orientale du Congo pour y entrer au service d'un négociant en café et en caoutchouc, Joseph Dobbelaere, originaire lui aussi de la Venise du Nord. Il ne quitte pas le Congo lors de l'indépendance du pays, en 1960. Il s'implique dans les guerres civiles du Congo, avec l'aide de ses miliciens, et abandonne sa plantation. Ainsi, en 1967, il participe au coup d'état de Moïse Tshombé contre Mobutu, en collaboration avec les mercenaires de Bob Denard. Le putsch est un désastre, les populations de Kinshassa restant fidèles au président. Schramme, qui a rang de colonel dans l'armée kantangaise, fait retraite vers l'Est, à Stanleyville (aujourd'hui Kisangani), puis vers Bukavu, à la frontière rwandaise, qu'il occupe le 10 août. Là, son armée composée de cent vingt-trois mercenaires et de six cents gendarmes katangais affronte du 29 octobre au 5 novembre 1967 les troupes de l'Armée nationale congolaise, vingt fois supérieure en nombre. Pliant sous le nombre, manquant de munitions, trahie par Denard, épaulée par des soldats katangais complètement épuisés, l'armée de Schramme se replie au Rwanda où elle est démobilisée. À partir de ce moment, l'itinéraire personnel entre de plain-pied dans les chaos de l'histoire. Et la légende, souvent, vient brouiller les pistes de la réalité. Recruté pour défendre le régime sécessionniste, le «léopard», comme l'ont surnommé ses hommes, devient instructeur dans l'armée katangaise. Sous-lieutenant, il se distingue particulièrement dans la guerre de mouvement. Spécialité: l'aptitude à tenir tête à des forces largement supérieures en nombre. Elle lui sera utile plus tard... L'offensive Léopard L'échec de la première tentative katangaise l'oblige toutefois à se replier sur l'Angola. Mais il ne renonce pas: avec de soi-disant «volontaires internationaux», il reforme une mini-armée et, lorsque Tshombé devient Premier ministre du Congo en 1964, il prend la tête d'un «bataillon Léopard», conglomérat de gendarmes katangais et de mercenaires européens. Fort de cette troupe d'élite chargée de réprimer les rébellions les plus graves, il «pacifie» les régions de Manono, Kongolo et Kabambare, avant, objectif suprême, de reconquérir «sa» province du Maniéma. Investi d'un prestige immense, il s'y arroge aussitôt la totalité des pouvoirs, militaire et civil. La chute de Tshombe et la montée en puissance de Mobutu vont bientôt mettre un frein à cette course à la gloire. Trahi par un autre spécialiste du mercenariat, le Français Bob Denard, avec lequel il a conclu une alliance de circonstance, Schramme, par reculs successifs, est bientôt acculé, avec moins d'un millier d'hommes, à Bukavu, sur la frontière burundaise. Face à l'armée congolaise déchaînée, appuyée de surcroît par des avions de chasse de fabrication américaine, il y tient un siège sans espoir. A un contre cent, la lutte se prolonge pendant plus de trois mois. Elle s'achève en déroute lorsqu'il évacue le reste de son «bataillon» vers le Burundi. L'«affaire Quintin» L'héroïsme abstrait de la lutte, cher aux amateurs d'épopées manichéennes, ne résiste toutefois pas aux dérapages individuels concrets. Car Jean Schramme, au cours de cette période troublée, s'est mué en meurtrier. En mai 1967, il reçoit, dans son poste de Yumbi, la visite d'un homme d'affaires tournaisien, Maurice Quintin. Qui se présente comme un émissaire de Moïse Tshombe. Faux, rétorque son hôte, qui y voit plutôt un agent provocateur envoyé par Mobutu. Bientôt, une mauvaise «querelle d'ivrognes» entre les deux hommes tourne mal: Schramme abat son interlocuteur d'un coup de fusil, puis ordonne à l'un de ses adjoints de l'achever avant de jeter le cadavre dans une rivière infestée de crocodiles. Episode tragique, de peu de poids peut-être au milieu des exactions commises dans les affres de la décolonisation, mais qui, même s'il est encore loin de s'en douter alors, le poursuivra des années plus tard jusqu'au bout de sa cavale éperdue.. En 1967, Schramme et Bob Denard attaquent l’Est du Congo 30 juin 1967 : le monde entier apprend avec stupéfaction l’enlèvement spectaculaire de l’ancien sécessionniste Moïse Kapend-Tshombe. Pris de panique au Congo, ses amis mercenaires, Schramme et Bob Denard, associés aux ex-gendarmes katangais, réagissent. Très rapidement, ils attaquent simultanément Kisangani, Kindu et Bukavu qu’ils vont occuper durant près de quatre mois. En juillet 1967, au terme d'une sanglante odyssée à travers le Congo ex-Belge, les mercenaires de Jean Schramme se sont enfermés dans Bukavu. Bukavu ? Une sorte de Hollywood africain au bord d'un lac indéfiniment bleu. Des maisons somptueuses, entourées de parcs à la française, servent de campement à 123 mercenaires blancs et 600 gendarmes katangais. Des caves pleines de champagne et de whisky, des magasins bourrés de provisions, quatre banques aux coffres bien remplis fournissent aux besoins de l'intendance. Échec à Kisangani Après l’enlèvement de Tshombe en Espagne, ses amis sont en désarroi. Ils vont agir vite pour le sauver. Il faudra renverser le nouveau pouvoir du généralMobutu, quitte à improviser. Une semaine après ce rapt mémorable, va éclater, à Kisangani, la révolte des mercenaires. Ils sont dirigés Par Jean Schramme, le Belge et Bob Denard, le Français. Schramme commandait des mercenaires, des ex-gendarmes katangais et quelques ex-rebelles Simba ralliés à l’ANC. Bob Denard dirigeait le 6ème commando composé de la même manière. Déjà, au mois de juin 1967, Denard avait averti Schramme que le Haut-Commandement de l’ANC se préparait à dissoudre ses unités pour les fondre dans l’Armée nationale. Cela allait compromettre leur avenir personnel, mais aussi toute reconquête du pouvoir par Tshombe. Tous ces mercenaires n’avaient pas rompu leurs liens avec Tshombe, malgré son exil. Dans le courant juin 1967, il avait déjà été convenu que les mercenaires puissent attaquer. Venant de Umbi vers le Sud-Est, Schramme devait attaquer Kisangani pour y rejoindre Denard. Une aide extérieure, venant de l’Angola, leur était déjà assurée pour attaquer par la suite le Katanga. Le mercenaire sud-africain Puren, commissionnaire en matériel de guerre, leur avait aussi garanti une puissante aide aérienne, qui clouerait au sol les unités de l’ANC ; et aussi de leur amener dès la prise de la ville, 200 volontaires rhodésiens (zimbabwéens). Au lever du soleil du 5 juillet 1970, le 10ème commando de Schramme attaque et atteint Kisangani par la rive droite. Ils ouvrent un feu nourri sur le camp Ketele abritant une partie de la garnison de l’ANC. Les soldats de l’Armée régulière, réunis pour le salut au drapeau, vont compter beaucoup de morts. En frappant ainsi par surprise, Schramme comptait sur la débandade de l’ANC : il se trompe. L’ANC n’est plus celle qui, en 1964, fuyait et détalait piteusement devant les rebelles. La contre offensive de l’ANC est violente, précise et professionnelle : Schramme décroche. Il a perdu beaucoup d’hommes et de véhicules. Il se replie alors vers le centre ville et vers l’aéroport toujours tenu par les hommes de Bob Denard qui, jusque là, n’ont pas réagi pour leur venir en aide. Denard paraît manger aux deux râteliers : Mobutu et Tshombe. Schramme va le rencontrer, fuyant dans sa Jeep vers Lubutu. Les deux hommes se résolvent de repartir à l’attaque sur Kisangani, où les hommes de Bob Denard se battront cette-fois plus sérieusement à l’aéroport. Là, Denard sera blessé à la nuque. Il est paralysé de deux jambes. C’est, étendu sur une civière, qu’il donne les ordres. Puis il gagne la Rhodésie (Zimbabwe) le 7 juillet en DC3 avec les autres blessés, en laissant tous les hommes valides à Schramme. Depuis lors, jusqu’à ce jour, Bob Denard en a gardé les séquelles en boitant. Tous les mercenaires restés sont intensément harcelés et bousculés violemment par l’ANC. Finalement, Schramme échoue dans sa prise de Kisangani. Lors de l'évacuation de Stan, le 12 juillet 1967, Schramme réquisitionna sept camions à la brasserie Stanor pour renforcer son charroi dont une partie avait été détruite à coups de mortiers près du camp Ketele par l'ANC. Après la réoccupation de Stan par l'ANC, le directeur de Stanor fut arrêté et battu comme plâtre alors qu'il n'en pouvait rien. Le 8 août, Schramme se dirigea vers Bukavu et les sept camions de Stanor furent du convoi. Cette photo a été prise lors de l'arrivée dans le chef-lieu du Kivu le 8 août 1967. Photo du "Patriote Illustré" de août 1967. (Source : Jean-Pierre SONCK) Occupation de Bukavu Le commandant mercenaire Hendriechs qui devait prendre Kindu, échoue face à la forte résistance de l’ANC. Il décroche et se replie. Seule réussite du plan des mercenaires, le commando dirigé par Noël s’empare de Bukavu dès le 5 juillet, en attaquant par surprise le camp Saïo où beaucoup de Congolais (civils et militaires) furent massacrés. Très vite, Noël et ses hommes vont laisser Bukavu à l’ANC, pour aller secourir Schramme. Les deux hommes se rencontrent en cours de route et remontent sur Bukavu qu’ils attaquent et occupent le 7 août. L’ANC fait le siège de Bukavu avec des C130 prêtés par Washington, des renforts et des avions T28, pilotés soit par des Congolais fraîchement formés soit par des Cubains anticastristes. Les mercenaires contre attaquent avec succès. Pire, un T28 de l’ANC, tire par erreur sur des militaires congolais, en plus, deux avions congolais se perdent. La démoralisation qui se répand dans l’ANC provoque des mutineries et même des ralliements aux mercenaires. Heureusement, l’ANC s’obstine et se requinque par des renforts dotés d’un punch particulier. La plupart de ces jeunes soldats étaient formés au centre d’entraînement commandos (CECODO) à Kota-Koli que dirigeait un vieux commando belge, le major Gaston Bebrone. Ancien mercenaire, ce copain de Bob Denard avait rejoint Mobutu, alors que les autres embrasaient l’Est du Congo. J’ai personnellement connu, longtemps après, en 1982 ce vieux baroudeur Bebrone quand j’étais incorporé au sein des Forces armées zaïroises avec d’autres étudiants meneurs des manifestations sur le campus, deux semaines avant la création de l’UDPS par les 13 parlementaires. Nous y avions retrouvé quelques militaires ayant participé à l’épopée de Bukavu. Ils avaient ramené comme butin de guerre le poignard de Schramme. Ce poignard sera incrusté au-dessus de la tombe du colonel Tshibangu écrasé dans sa voiture en 1977 vers le Mont-Ngaliema, après la guerre du Shaba. Feu colonel Tshibangu, qui fut commandant du CECODO au début des années 70, avait participé aussi au siège de Bukavu en 1967, où, avec d’autres, ils avaient contraint Schramme et ses hommes à fuir en catastrophe Bukavu le 3 novembre, vers le Rwanda. Tractation à l'OUA Durant l’encerclement de Bukavu par l’ANC en août, se voulant y laver la piteuse image du Congo depuis l’indépendance, Mobutu mobilise des moyens colossaux pour donner un éclat particulier à l’événement. La cité de l’OUA est construite au Mont-Ngaliema. L’avenue OUA à Kintambo est construite. Le boulevard Lumumba est électrifié jusqu’à l’aéroport de N’djili. Mobutu compte sur la solidarité africaine pour réduire les mercenaires. Du fait, l’OUA votera une résolution pour aider le Congo à se débarrasser des mercenaires. Un comité spécial est institué pour obtenir le départ des mercenaires par tous les moyens de Bukavu. Présidé par le chef de l’Etat soudanais, Ismaël Azhri, il comprend les chefs d’Etat du Burundi (Michombero) et de l’Ethiopie (Empereur Hailé Selassie). Les tractations s’ouvrent entre ce comité et Jean Schramme. Il est prévu que, si les mercenaires n’acceptent pas de déguerpir, l’OUA usera de la force, en lançant contre eux une armée interafricaine. Mais s’ils acceptent de vider les lieux, ils pourraient gagner le Rwanda, et s’y réfugier sous la protection de ce pays, en attendant d’être évacués vers leurs pays respectifs par les soins de la Croix-Rouge internationale. Schramme accepte la proposition de l’OUA par l’entremise d’un médecin de Bukavu, Charles Schyns. Toutefois, il exige que ses combattants congolais puissent aussi bénéficier d’une protection internationale. Le Zambien Kenneth Kaunda s’offre alors pour accueillir chez lui les ex-gendarmes katangais comme réfugiés politiques. Fuite au Rwanda Pendant toutes ces tractations, les combats se poursuivent à Bukavu. La pression est tellement forte, que Schramme et ses hommes n’attendent pas la mise au point du Plan de l’OUA et de la Croix-Rouge internationale. Ils seront contraints de fuir vers le Rwanda. Ils y déposent les armes le 3 novembre 1967 et seront accueillis par les autorités du Rwanda. Sous le contrôle de la Croix-Rouge. Là, à Cyangungu au Rwanda, il y aura 129 mercenaires et 2500 Katangais. Tous avec leurs familles. (Congo-autrement)
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